La belle et la bête
Et si c’était une femme qui allait faire trébucher Donald Trump dans sa course vers la présidence ? Les fans de l’homme agité jugent le danger si réel qu’ils la maudissent déjà, lui inventent des légendes abracadabrantes, la couvrent d’insultes et d’invectives. Elle n’a encore rien dit, ils frémissent déjà. La chanteuse pop est si populaire, si influente qu’elle a les moyens de faire gagner Biden et de terrasser Trump. Un mot d’elle et l’Amérique bascule.
Taylor Swift est cette déesse dont on attend l’oracle. Elle vole de continent en continent sur son jet privé. Elle électrise les foules, gagne un milliard de dollars avec une tournée de concerts, fait bouger le PIB du pays où elle se produit, à en croire les instituts économiques les plus sérieux, elle provoque des vibrations que des sismographes sensibles ont enregistrés ici ou là. Elle collectionne les Grammy Awards, elle vend des millions d’albums. Un phénomène dont nous avons de la peine à prendre l’exacte mesure en Europe qui découvre éberluée la mue de la gentille chanteuse de country en furieuse icône planétaire. Time Magazine en a fait sa personnalité de l’année 2023.
Les ados qui l’adorent ont grandi, un peu, et peuvent désormais voter. Swift la véloce, si bien nommée, les y encourage. Des sondages disent que près de 20% de ses fans, les « Swifties », seraient prêts à voter pour le candidat qu’elle désignera. Et ils sont des millions à la suivre sur ses réseaux sociaux.
Une bête de scène versus une beauté du diable
Le combat est asymétrique. Trump est une bête de scène mais que peut-il contre cette beauté du diable qui répond aux éructations du politicien par des rimes et des rythmes de poétesse ? Quand il fait le méchant, elle joue la délicatesse. Elle a peut-être découvert l’arme fatale à même de désarçonner Trump. Un soft power qui a tout de l’uppercut, venu de nulle part, plaçant la bataille dans une autre dimension qui n’est plus le ring politique d’usage. Ces deux-là ne boxent pas dans la même catégorie. N’est pas le poids lourd celui qui le paraît.
Les « Swifties » seront-ils des électeurs dociles et obéissants ? Difficile de le prévoir. Mais Taylor Swift fait peur. Les partisans de Trump expliquent qu’elle pourrait bien être une créature du Pentagone, un agent provocateur, dont le rôle et le succès dans la chanson serviraient de couverture à une vaste opération décidée à la Maison-Blanche. Un complot, un de plus, que Trump se devrait de déjouer avant novembre prochain.
Taylor Swift pourrait faire la différence, apporter ce petit plus décisif dans une élection annoncée serrée. En tous cas, si elle décide de prescrire un mot d’ordre, il sera démocrate. Taylor Swift a déjà dans le passé pris position pour l’avortement, les droits des femmes, les droits LGBT, soutenu des sénateurs démocrates. Elle ne fait pas mystère de ses convictions. Elle a déjà suggéré à ses fans de s’inscrire sur les listes électorales, provoquant une avalanche d’inscriptions.
Les dieux ont envoyé un signe le weekend dernier. Son petit ami, Travis Kelce, star de football américain, bâti comme un héros de Marvel, a gagné le Super Bowl avec son équipe du Kansas battant l’équipe de San Francisco. La foule a plus scruté la chanteuse que les phases de la rencontre. Et au final, ils ont regardé amourés le baiser au vainqueur. C’est désormais un couple qui marche ensemble vers la renommée. Que feront-ils de cette gloire nouvelle ?